Edition et publication sur le Web

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1- Définition technique et pratique

Grâce au développement de logiciels d’édition simples et conviviaux, l’édition et la publication sur le Web sont devenues des activités à la portée du large public de l’éducation. La création d’un site Web offre aux enseignants et à leurs élèves de multiples possibilités de valorisation des activités d’apprentissage. L’édition et la publication de pages Web présentent l’intérêt de fédérer toute une classe à travers la rédaction de brèves, de nouvelles, d’éditoriaux, de reportages ou la création d’images, de photographies, de séquences vidéo et de graphismes. Il peut ainsi être envisagé l’élaboration d’un journal ou d’un magazine en ligne ou la diffusion d’une émission radiophonique ou télévisuelle sous la forme d’un cyber-reportage. Ces activités très formatrices ont un intérêt pédagogique certain. Les travaux des élèves sont mis en valeur et leur publication en ligne offre aux enseignants un outil et du matériel utiles pour l’apprentissage des nouveaux élèves. Ceci explique que de nombreuses écoles possèdent dès à présent leur propre site Web.

La publication sur le Web ouvre ainsi de nombreuses perspectives dans l’éducation, mais confronte en même temps les acteurs du milieu scolaire à des risques inédits.


2- Les risques

Lorsqu’on édite et publie sur le Web, la vigilance est à la mesure de la complexité potentielle d’un site Web qui ne se résume pas toujours à un texte mis en ligne. Un site Web peut comprendre du texte mais aussi des images, des photographies, des vidéos, des bases de données, des logiciels de recherche, des hyperliens. A ces différents types de contenu correspondent autant d’obligations différentes.

 

2.1 - Les informations obligatoires

Considéré légalement comme un « service de communication au public en ligne », le site Web doit obligatoirement afficher des informations sur les personnes qui l’éditent et qui l’hébergent.
Ces mentions sont déterminées par l’article 6-III de la Loi pour la Confiance dans l'Économie Numérique du 21 juin 2004 selon que l’éditeur est ou non un professionnel.

En ce qui concerne les éditeurs considérés comme professionnels, ces derniers sont soumis à l’obligation de mettre à disposition du public, dans un standard ouvert :

1. Dans le cas d’un éditeur personne physique, son nom, prénom, domicile et numéro de téléphone et, s’il est assujetti aux formalités d'inscription au registre du commerce et des sociétés ou au répertoire des métiers, le numéro de son inscription ;

2. S'il s'agit d’une personne morale (l’établissement scolaire notamment), sa dénomination ou sa raison sociale et son siège social, son numéro de téléphone et, s'il s'agit d'une entreprise assujettie aux formalités d'inscription au registre du commerce et des sociétés ou au répertoire des métiers, le numéro de son inscription, son capital social, l'adresse du siège social ;

3. Le nom du directeur ou du codirecteur de la publication (souvent le chef d’établissement) et, le cas échéant, celui du responsable de la rédaction au sens de l'article 93-2 de la loi n° 82-652 du 29 juillet 1982 précitée (souvent l’enseignant en charge du suivi du site). Le directeur de publication peut être différent du responsable légal et peut même appartenir à une entité qui n’a pas de personnalité juridique, comme un directeur d’école.

4. Les nom et prénom du responsable de rédaction, chargé du suivi éventuel du droit de réponse, avec le moyen de le contacter. Ce n’est qu’un simple gestionnaire, non responsable (cf. loi du 29/07/1982).

5. Le nom, la dénomination ou la raison sociale et l'adresse et le numéro de téléphone de son hébergeur.

6. Les moyens de contacter le webmestre (une adresse électronique est préférable).

7. S’il y a eu autorisation de la CNIL, il est recommandé de mettre :

8. Si le point 7 est rempli, il serait bon de mettre clairement la référence à la Loi Informatique et Liberté de 1978 et aux droits des utilisateurs concernant l’accès aux données personnelles.

9. La mention du copyright est souhaitée, mais n’est pas obligatoire ni forcément utile ; elle ne vaut que comme simple commencement de preuve ; exemple ; ©RaisonSociale-date (= mois et année de la première publication).

10. Une charte et les indications des textes juridiques européens et français doivent être accessibles depuis la page légale. Cette charte est surtout un texte de bon usage, explicitant les droits et devoirs des utilisateurs et les services rendus. Le rappel des textes concernant lois et règlements fait partie de « l’obligation de prévenir » même si « nul n’est censé ignorer la loi ».


Les éditeurs non professionnels, comme c’est le cas des élèves de l’établissement scolaire qui créeraient un blog par exemple, se voient accorder la possibilité de ne tenir à la disposition du public, pour préserver leur anonymat, que le nom, la dénomination ou la raison sociale et l'adresse de leur hébergeur, sous réserve de lui avoir communiqué les éléments d'identification personnelle prévus à l’article 6-I de la LCEN.
Enfin notons qu’en cas de non respect des obligations mises à leur charge à l’article 6-III LCEN, les personnes physique, les personnes morales et leurs dirigeants de fait et de droit encourent les mêmes sanctions pénales que les hébergeurs et fournisseurs d’accès à internet (art. 6-VI-2 LCEN).
L’intérêt de ces mentions obligatoires est de faciliter la mise en œuvre de la responsabilité en cas de préjudice suite à la publication d’informations sur le site Web, compte tenu de nombreuses atteintes possibles aux droits des personnes et à l’ordre public qui nous restent à étudier.

 

2.2 - Les atteintes à l’honneur et à la réputation

Comme pour les forums ou les listes de discussion, le site Web peut être le moyen de diffuser des propos injurieux, diffamatoires, voire haineux ou racistes.
Pour l’injure publique ou la diffamation, il s’agit d’un délit de presse exposé plus haut qui peut être imputé à son auteur et à défaut, au responsable éditorial ou au directeur de publication (responsabilité en cascade).
Les propos racistes peuvent également être poursuivis (art. 32 loi du 29 juillet 1881), comme l’apologie des crimes contre l’humanité (art. 24 loi du 29 juillet 1881).


2.3 - Les atteintes à la vie privée

L’intimité des personnes doit être respectée par les créateurs de sites Web qui ne doivent pas, sous peine de poursuites, publier ni des photos prises dans un lieu privé ni des informations sur la vie intime des personnes sans leur consentement.

L’atteinte à la vie privée peut également être le fait de diffuser des données personnelles. Le site peut ainsi avoir mis en ligne l’annuaire des enseignants ou des élèves. S’il y a collecte et traitement de données à caractère personnel, le responsable du site doit obtenir l’accord des personnes concernées et déclarer le traitement à la CNIL (certaines déclarations simplifiées sont directement téléchargeables sur le site Web de la CNIL [www.cnil.fr]).

Plus que les données à caractère personnel, certains sites en milieu scolaire peuvent utiliser les photos des élèves mineurs. Dans ce cas, l’autorisation des deux parents est toujours requise.

Ceci dit, pour information, même avec l’accord des parents, la diffusion, la fixation, l’enregistrement ou la transmission d’images de mineurs ayant un caractère pornographique manifeste est lourdement réprimé (art. 227-23 du Code pénal).

Il va de même pour la provocation de mineurs à l’usage de stupéfiants ou à la consommation d’alcool (art. 228-23 du Code pénal).

En outre, la publication de montage utilisant les paroles ou l’image d’une personne sans son consentement et/ou sans indiquer le caractère falsifié du message est aussi sanctionnée (art. 226-8 du Code pénal).

Enfin le directeur de la publication est tenu d’insérer dans un délai de trois jours à partir de sa réception, la réponse émise par une personne nommée ou désignée par son service de communication en ligne dans le cadre du droit de réponse dont elle dispose au titre de l’article 6 IV alinéa 1 de la LCEN. Le non respect de cette obligation est sanctionné d’une amende de 3750 euros (art. 6-IV, al. 3 LCEN.)

 

3) Qui est responsable pour un site éducatif ?

Il faut distinguer le site de l'établissement et les sites pédagogiques élaborés par les enseignants. Le site d'établissement est institutionnel et est en conséquence soumis à certaines règles spécifiques.

Les sites internet sont considérés comme des « services de communication audiovisuelle au public », et donc soumis aux mêmes règles (cf. loi 86-1067 du 30/09/1986 et loi 2000-709 du 01/08/2000). Seul l’État ne peut pas être poursuivi comme personne morale. L’auteur de l’infraction peut être poursuivi, sauf pour les infractions de presse. Pour les hébergeurs de l’Éducation Nationale, c’est l’autorité judiciaire qui poursuit, pas l’autorité administrative !

Les prestataires techniques (FAI, services de caching, transporteurs et même hébergeurs…), considérés comme simples auxiliaires, ne sont pas responsables en droit européen et français, sauf sous conditions précises (refus d’obtempérer par exemple).

Pour les très nombreux délits de presse et de publication, la responsabilité « en cascade » s’applique : c’est le directeur de publication qui est responsable, sinon l’auteur incriminé, sinon le producteur.

Remarque 1 : le producteur ne peut en aucun cas être l’hébergeur, sur ce point jugé irresponsable.

Remarque 2 : le webmestre, le modérateur d’un forum… ne sont donc pas tenus pour responsables des contenus…

Ces délits de presse concernent entre autres : diffamation, injure, fausses nouvelles, provocation aux crimes et délits, incitation au suicide, à la toxicomanie…

 

4) Qui est considéré comme directeur de publication ?

C’est le propriétaire de site pour une société, ou un établissement public, si le site est doté d’une personnalité morale. Donc dans l’Éducation Nationale, c’est le responsable de l’établissement qui possède le site.

Mais il semble qu’une délégation soit possible. Le directeur de publication ne serait pas alors le responsable légal. Mais attention, des sites d’établissements hébergent des sites d’élèves, d’association (FSE…), ce qui nécessite un contrat d’hébergement et donc désignation pour chacun d’un directeur de publication propre.

Concernant les écoles primaires, la responsabilité administrative incombe principalement à l’inspecteur de l’éducation nationale (IEN) dont dépend l’école. En cas de mise en cause de l’école élémentaire lors d’activités en ligne pour non-respect du règlement intérieur, seul l’IEN peut représenter l’école.

Pour les écoles primaires, le responsable de la rédaction est plus délicat à situer : le directeur d’école n’ayant pas la même responsabilité qu’un directeur d’établissement du second degré. Cependant le directeur d’école est de plus en plus reconnu pour cette fonction, pour un critère d’efficacité, pas un critère hiérarchique. (Cf. LIJ n°61-janvier 2002). Sinon, par simple présomption, le directeur de publication est l’IA.

L’auteur peut être poursuivi comme complice. Il est cependant poursuivi comme auteur principal s’il n’y a pas de directeur de publication. Enfin, s’il n’y a ni directeur, ni auteur identifiable, c’est le producteur et le distributeur qui seraient inquiétés en cas de faute.

 

5) Questions diverses :

Peut-on mettre de la publicité sur un site d'établissement ?

Un établissement ne peut mettre de publicité sur son site dans la mesure où il est soumis au principe de neutralité commerciale et où deux circulaires relatives à l'interdiction des pratiques commerciales dans les établissements publics d'enseignement, interdisent toute publicité dans le système éducatif.

Cette interdiction connaît une atténuation dans le cas d'un partenariat pédagogique avec une entreprise.

Est-il possible de mettre un forum sur un site d'établissement ?

Oui, mais il faut prendre quelques précautions :

 

6) Conseils